… ou comment naît l’idée d’arrêter de bosser
Voilà comment tout a commencé … Non, ce n’est pas possible de dire précisément quand tout a commencé. C’est un processus qui s’est tramé en coulisse, discrètement, qui m’a amené à cette décision radicale : arrêter de travailler (temporairement s’entend).
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Mon premier réflexe devant ce mal-être professionnel (et ses répercussions sur ma vie personnelle pardi) a été d’aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs : changer d’entreprise. J’ai des compétences, j’allais les proposer à d’autres.
Pendant 2 ans, je suis en veille comme on dit, c’est-à-dire que je surveille les annonces pour postuler à des offres d’emploi, je suis active sur des réseaux sociaux pro, mon CV est disponible en ligne pour me faire chasser. Quel terme atroce ! Qui signifie que des cabinets de recrutement me contactent pour évaluer si je pourrais être la perdrix tant recherchée par leur client du moment. Je ne m’étendrai pas sur ces intervenants (ça pourrait faire l’objet d’un article entier), disons juste que j’en ai croisés quelques-uns qui gardent mon estime.
Donc mon CV plaît aux recruteurs, je suis contactée, les premiers échanges se passent bien, je suis régulièrement dans le peloton de tête (les 2 ou 3 candidats sélectionnés au final) … Mais aucune candidature n’aboutit. J’essaye même d’afficher mes valeurs de respect de l’homme et de son environnement pour attirer des entreprises qui y sont sensibles. Niet.
Vous imaginez le cycle à chaque fois : excitation à l’idée d’un nouveau poste, motivation, préparation pour les entretiens, projection dans une nouvelle vie, représentation devant les recruteurs (c’est un exercice que je situe entre le théâtre et la vie), revenir avec des envies et des doutes, attendre la réponse en cogitant, recevoir un « non merci », retombée de soufflet, il faut retourner bosser … avec le sourire ! C’est é-pui-sant, moralement et physiquement.
Vient alors la remise en question : pourquoi est-ce que ça ne marche pas ? Et la réponse (de la petite voix dans ma tête) : « Parce que tu n’es pas foncièrement motivée, ma vieille ». Et pourquoi ? Cette réponse-là il me faudra du temps pour accepter de l’entendre : « Parce que tu n’aimes plus ce que tu fais ».
Vlan, ailes coupées en plein vol. Envolé le parcours doré, tout tracé, école d’ingé, belle boîte, belle carrière, belle vie qui va avec. J’ai fait tout comme il faut, pourtant ! Tout ? Non, je n’ai pas écouté mes aspirations profondes, toute occupée que j’étais à être performante, à donner satisfaction à autrui. Résultat : mon job manque de sens à mes yeux et surtout ma vie ne ME donne pas satisfaction.
A un moment donné, je suis tellement mal que je prends conscience que je perds ma vie à la gagner. Et c’est là que je me dis que ce n’est plus tolérable et que je dois me prendre en main, que je ne peux pas, à 36 ans, être malheureuse dans ma cage dorée – où je me suis mise moi-même, soyons clairs, je ne rends personne responsable de mes choix de vie. Je sens que j’ai besoin d’ouvrir mes ailes, qu’il est temps d’être moi-même.
« Ok ! C’est bien ma fille ! Et avec ça tu fais quoi ? » dit la petite voix rabat-joie dans ma tête. Alors, je cogite (une de mes activités favorites, énergivore et chronophage, mais ça c’est une autre histoire) … Je cogite donc … Qu’est-ce que j’aime faire ? Refaire le monde avec une amie en sirotant un breuvage tanique de couleur bordeaux, c’est recevable comme réponse ? Non, ah bon.
Plus sérieusement, au boulot c’est simple, je n’aime plus qu’une chose : le management, le relationnel. Reconversion RH ? Non, le côté réglementaire va me saouler, je serais encore plus en 1ère ligne des décisions de la direction et en dehors des équipes. En Terminale, j’avais pensé au métier de psychomotricienne, est-ce encore d’actualité ? Je me renseigne, non ça ne me fait plus vibrer. Par contre, ma brochure d’école d’ingé affichait « Nourrir les hommes », et ça, ça me fait vibrer ! Je réalise que je parle régulièrement alimentation, nutrition, activité physique avec les gens. On vient me poser des questions, j’ai plaisir à échanger sur ces sujets. Mais quel métier, quelle formation ?
Un milliard de questions se posent et, je ne sais comment, j’arrive à stopper ce flot anxiogène, à faire confiance à cet élan qui part de mes tripes et me dit que je dois arrêter de travailler (avant d’être vraiment malade), prendre le temps de me recentrer et que je vais trouver ma voie. Réflexe de survie ? Fruit du travail sur moi-même ? Qui sait ? Peu importe, c’est décidé, je me lance !
Biensûr il faudra un moment avant de me jeter à l’eau. D’abord, j’en parle à mes proches, je m’assure de leur soutien (en cas de blues, j’aurais besoin d’eux), je teste mon idée sur eux qui me connaissent bien. Puis j’en parle à des collègues de confiance, qui me connaissent dans un autre milieu que mes proches. Bref je rode mon discours. Parce que concrètement, aller dire à son boss qu’on veut s’en aller, c’est un exercice délicat, qui peut vite tourner au lâcher de bombe.
Et autant j’étais prête à entendre les réflexions atterrées et les sarcasmes d’un tas de gens qui ne comprendraient pas ma décision, autant je tenais à ce que ça se passe le mieux possible avec mon patron et à partir dans de bonnes conditions. J’en ressentais le besoin aussi bien pour moi, que pour ceux qui resteraient (esprit d’équipe oblige), que pour lui qui allait devoir gérer mon départ. Nul n’est irremplaçable, certes, mais un membre de son équipe qui se barre ce n’est pas plaisant (ok ça dépend, si c’est Jo Lecrampon …) et, dans tous les cas, c’est du boulot en plus.
Dans le prochain article, je vous raconte cet entretien avec mon boss et mes derniers mois de travail. D’ici là, n’hésitez pas à laisser vos questions et réflexions en commentaire.
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Je me retrouve tellement dans ce chemin… j ai hâte de lire la suite…. vite, le prochain épisode!!!!! 🙂
Merci pour ce partage.
Toujours un plaisir… au delà de ta nouvelle voie…peut être y en a-t-il une en parallèle ?… celle de l’écriture car tu as une belle plume…légère, honnête et sincère, de l’humour et du dynamisme. Nul doute que beaucoup prendraient plaisir à lire toute cette épopée partagée par de nombreux contemporains qui comme toi, comme nous, se posent les questions sur nos valeurs, le sens, la vision…
Bref vivement la suite !
Un très beau second article… je me reconnais dans une partie du cheminement. En tout cas, l’envie de bouger et la certitude qu’il ne faut pas attendre qu’un changement nous « tombe dessus ».
Merci pour ces retours.
En effet Delphine, autant la vie peut nous proposer de très belles synchronicité, autant je pense qu’il faut savoir les provoquer, ne pas rester statique en attendant la révélation 😉
Hâte de lire la suite…